Au Mont-Liban et en Bekaa occidentale, l’effondrement économique 7 mois après l’explosion du port de la capitale expose les adolescentes libanaises et syriennes à la déscolarisation, aux violences physiques et psychologiques, aux mariages d’enfants, à l’exploitation et à l’insécurité alimentaire.
Le constat dressé ces derniers mois au Liban par l’ONG Plan International est dramatique. Il ressort notamment d’une enquête réalisée entre le 16 et le 29 décembre dernier, auprès de 341 parents et 256 adolescent·e·s. Le but ? Évaluer les besoins en matière d’éducation et de protection des réfugié·e·s syrien·ne·s et des familles libanaises en situation de vulnérabilité qui vivent en Bekaa occidentale (au centre du Liban, à 60 km de Beyrouth) et au Mont Liban (centre-ouest du Liban, à 20 km de la capitale Beyrouth) en plein contexte d’effondrement économique, de pandémie de Covid-19 et d’explosion du port de Beyrouth en août 2020.
- Plus d’1 adolescent·e sur 4 (27 %) est privé·e d’enseignement scolaire en raison du coût des études et des restrictions sanitaires. Pourtant, 89 % d’entre eux/elles souhaiteraient retourner à l’école, en formation ou en apprentissage.
- Les filles sont davantage affectées que les garçons : 57 % des enfants déscolarisé·e·s sont des adolescentes âgées de 10 à 17 ans. En dehors de l’école, elles se retrouvent plus exposées aux risques de violence, de mariages forcés et de grossesses précoces.
- Plus d’1/3 des adolescentes souffrent d’une augmentation de la violence.
- 34 % des adolescent·e·s connaissent un enfant de sa communauté marié·e avant ses 18 ans.
- Plus d’1 adolescent·e sur 2 (soit 57 %) connait un enfant contraint au travail forcé dans sa communauté.
- 59 % des adolescentes confessent ne pas avoir les moyens d’acheter des protections hygiéniques, ce qui met en danger leur santé.
- 81 % des personnes qui ont des enfants à charge ne peuvent subvenir aux besoins essentiels de leur famille : nourriture et vêtements (76 %), médicaments (58 %), frais de scolarité (32 %).
« Au quotidien, nous voyons de plus en plus de gens se battre pour de la nourriture dans les supermarchés. Les aliments essentiels, comme le lait en poudre et les médicaments, sont fréquemment épuisés, ce qui menace la santé des enfants et des plus fragiles. Cette situation dramatique risque d’empirer », témoigne Colin Lee, directeur régional de Plan International au Moyen-Orient et en Afrique du Nord.
« Cette crise au Liban et ses conséquences sur le bien-être des enfants nous inquiètent fortement. Ils ont traversé tant d’épreuves en deux ans avec la fermeture complète des écoles, les confinements, la dégradation économique et l’inquiétude de leurs familles. Sans oublier l’explosion de Beyrouth » rappelle Riwa Maktabi, chargée de programmes à Plan International Liban.
Fatmeh, 45 ans, réfugiée syrienne. Elle vit à Beyrouth avec son mari et ses 10 enfants. Seuls 3 d’entre eux vont encore à l’école.
« Avant, les enfants allaient à l’école en bus, mais les frais de transports montent jusqu’à 40,000 Livres Libanaises chacun (soit 26 USD). Aujourd’hui, je n’ai plus suffisamment d’argent pour régler les frais de scolarité de 3 de mes enfants. Comment vais-je payer leur nourriture, leurs vêtements, leurs livres, leur matériel scolaire et leurs frais de transport ? Je ne peux tout simplement plus ».
Notes aux rédactions :
- Parmi les familles libanaises et de réfugié·e·s syrien·ne·s, plus d’1/3 ne peut plus envoyer leurs enfants à l’école.
- 3 familles sur 4 ne peuvent pas acheter de la nourriture ou des vêtements.
- 55 % des adolescent·e·s se disent insatisfait·e·s de l’enseignement à distance et des solutions d’apprentissage hybrides. Les causes : mauvais accès à Internet (64 %), absence de matériel scolaire (48 %), faible soutien parental (31 %) et absence d’un environnement stable et calme pour apprendre à la maison (29 %).
- Santé mentale : 73 % des adolescent·e·s et 96 % de leurs responsables affirment se sentir stressé·e·s pendant cette période. Les causes de stress relevées par les adolescent·e·s comprennent : la peur d’une infection à la Covid-19 (51 %), le fait de ne pas pouvoir retourner à l’école (44 %), le fait de ne pas participer aux activités et être astreint à la maison (45 %) et les défis économiques (30 %).
- Plus de la moitié des Libanais·e·s vivent en dessous du seuil de pauvreté.
Contacts médias (données, photographies, interviews des équipes sur place…) :
- Léa Dorigny – lea.dorigny@plan-international.org
- Julien Beauhaire – 01 84 87 03 52 – julien.beauhaire@plan-international.org