En Egypte, 99 % des filles et des femmes ont été victimes d’harcèlement sexuel dans la rue (ONU). En août dernier, Rania Fahmy, 23 ans, se fait agresser par un homme alors qu’elle part faire des courses. Déterminée le faire inculper, elle le traduit en justice et gagne son combat. L’agresseur est condamné à 3 ans de prison. Une victoire dans un pays où la plupart des victimes ne portent pas plainte et où les normes sociales disent que les femmes sont responsables si elles sont agressées.

Rania Fahmy : le modèle dont les filles ont besoin en Égypte

« Tout commence un vendredi du mois d’août. J’étais sortie faire des courses quand un homme m’a harcelé sexuellement dans la rue », raconte Rania Fahmy, 23 ans, à la télévision égyptienne. « Je lui ai crié dessus mais il a commencé à me battre alors je l’ai frappé avec mon sac à main. » 

Une caméra de surveillance filme la scène. Son agresseur est condamné à 3 ans de prison. Elle devient la femme la plus jeune à avoir obtenu une condamnation contre un harceleur sexuel, dans une région pourtant très conservatrice. 

Rania Fahmy, déterminée à voir son harceleur traduit en justice, a fait campagne sans relâche jusqu’à son inculpation. Elle a depuis été honorée par le Conseil national égyptien pour les femmes.

Son courage et sa confiance en elle font de la jeune femme le modèle dont les filles ont besoin en Égypte.

Car la réalité est tout autre. La plupart des Égyptiennes ne parlent pas si elle se font sexuellement harcelée. Selon une étude de l’ONU, 99 % des filles et des femmes en Egypte en ont été victimes et seul 6,6% d’entre elles ont demandé de l’aide des forces de l’ordre.

Les causes du harcèlement de rue en Egypte

Les femmes sont souvent considérées comme responsables de leur propre harcèlement. Plus de trois quarts des harceleurs sexuels ont cité la tenue « provocatrice » d’une femme comme une raison légitime de leurs actes, selon une étude d’ONU Femmes et de l’ONG Promundo.

Celles qui parlent sont régulièrement punies.

« En général, la communauté reproche aux filles si elles sont harcelées et si elles le disent », raconte Nada, une élève de 14 ans qui vit dans le bidonville du quartier d’Ezbet Khairallah au Caire.
« Si une fille est dans un bus et qu’un homme la touche, les témoins de la scène vont dire que l’homme n’a rien fait, que c’est une erreur et vont accuser la fille. La communauté blâme les filles pour tout ce qui leur arrive ». 

Lorsqu’elles répondent à leur agresseur pour lui dire d’arrêter, on croit qu’elles sont heureuses de l’attention qu’il leur porte. 

Beaucoup de filles sont retirées de l’école car les parents ont peur que le harcèlement de rue entache l’honneur de la famille

Quand des parents voit leur fille répondre à un homme en public, il y a de grandes chances qu’ils la retirent de l’école.   

« Beaucoup de filles sont retirées de l’école car les parents ont peur que le harcèlement de rue entache l’honneur de la famille », explique Dr Jacinthe Ibrahim, responsable de programme à Plan International Egypte.  
« Ils ont peur qu’elles ne trouvent pas de mari. Cela peut les pousser à faire taire leur fille si elles ont été harcelées ou même violées. » 

Par ailleurs, les plaintes déposées n’aboutissent presque jamais. Bien que le harcèlement sexuel soit puni en Egypte depuis 2014, les cas comme celui de Rania Fahmy où les auteurs sont traduits en justice sont rares. 

De plus, une femme sur dix interrogée par l’ONU déclare avoir été harcelée par le policier à qui elle avait demandé de l’aide. La plupart des filles et des femmes préfèrent donc garder le silence.

Faire que les choses changent

Les filles et les femmes Égyptiennes ont le droit d’être en sécurité et dignes dans la rue, comme les hommes.

Le projet de Plan International pour rendre les villes plus sûres au Caire a pour but de transformer les quartiers en lieux sûrs où les filles sont respectées et peuvent aller à l’école ou au travail sans crainte de violence ou de harcèlement

1 000 filles en ont bénéficiées depuis 2015. Elles disposent d’une plate-forme pour discuter des problèmes auxquels elles sont confrontées. Elles peuvent ensuite dialoguer avec les autorités grâce à des réunions régulières et contribuer au développement de leur quartier.

Les filles et les femmes s’expriment plus facilement quand elles savent qu’elles sont prises au sérieux. 

Les parents doivent faire passer la sécurité, le bien-être et la scolarité de leur fille avant l’honneur familial. Les hommes doivent aider les filles dans la rue si elles sont victimes d’agression. 

Il faut un système judiciaire fiable, augmenter le nombre de policières dans la rue et former davantage d’agents pour qu’ils sachent comment gérer les victimes de harcèlement avec les soins qu’elles méritent.

Les filles et les femmes doivent pouvoir compter sur les postes de police sûrs et savoir que les agents qui ne respectent pas les règles seront punis par la loi.

Le cas de Rania Fahmy montre qu’elles peuvent défendre leurs droits. La jeune femme a reçu beaucoup de messages de soutien sur les médias sociaux. Preuve d’un soutien croissant pour ceux qui s’expriment.

Pourtant, la plupart des filles ne peuvent pas le faire seules. Soutenons-les.  

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