Alors que le monde affronte une crise sanitaire sans précédent, les adolescentes des bidonvilles du Kenya font face à une autre situation de crise : le manque de protections hygiéniques. En effet, la fermeture des écoles pour éviter la propagation du Covid-19 les empêche d’avoir accès à ces produits qui y sont d’habitude distribués gratuitement.
Une double situation d’urgence
« D’habitude, je recevais des serviettes hygiéniques dans mon école a Kibera. Maintenant que les écoles sont fermées, je dois utiliser des morceaux de vêtement, ce qui est très inconfortable », témoigne Nisera, 16 ans.
« Je suis triste car il y a des choses que je ne peux plus faire normalement, comme les tâches ménagères ou simplement m’asseoir, parce que j’ai peur de tacher mes habits », poursuit-elle.
À cause des mesures de quarantaine imposées en réponse à la pandémie de COVID-19 au Kenya, de nombreuses familles font face à des difficultés économiques supplémentaires. Les femmes et les filles sont les plus durement touchées : beaucoup d’entre elles n’ont plus accès aux services de santé sexuelle et reproductive et aux liens sociaux qui leur étaient essentiels.
« Il ne me reste que 8 serviettes hygiéniques. Après, je n’aurai pas d’autre choix qu’utiliser des bouts de vêtements. »
« Au moment du confinement, de nombreuses familles de ma région ont fait des provisions, mais je peux vous assurer qu’elles n’ont pas pensé aux serviettes hygiéniques. C’est généralement considéré comme un luxe. C’est pour cela que je suis contente d’aller à l’école, on peut y obtenir des protections hygiéniques », raconte Nisera.
« Il est nécessaire d’accompagner les mesures de confinement par un soutien aux familles vulnérables. Le confinement réduit l’autonomie des filles et renforce les attitudes et pratiques discriminatoires, qui les relèguent au second rang », explique Kate Maina-Vorley directrice de Plan International au Kenya.
« Une protection rigoureuse contre de tels chocs économiques doit être mise en place pour tou.te.s les enfants, les filles et les femmes concerné.e.s. Cette protection doit être intégrée dans toutes les politiques d’intervention, d’information et d’orientation de réponse à une telle crise », complète-t-elle.
Marel, 17 ans, elle, s’inquiète pour les adolescentes aux menstruations irrégulières : « Certaines d’entre nous ont leurs règles deux fois par mois. Imaginez à quel point cela est difficile. »
La réponse de Plan International
Pour aider les filles à surmonter cette crise, l’ONG Plan International a distribué 2 700 serviettes hygiéniques aux adolescentes de Kibera, près de Nairobi. La distribution a été organisée en partenariat avec Zana Africa, une organisation partenaire de nos activités au Kenya.
Cynthia, jeune militante qui nous a aidé à distribuer les serviettes hygiéniques, a été très étonnée par la réaction des jeunes femmes :
« Les adolescentes étaient ravies de la distribution. Mais j’ai été surprise car, dans certaines maisons, même les mères attendaient nos produits avec impatience. J’ai eu mal au cœur et je leur ai donné de nombreux produits. Je ne pensais pas que même les femmes plus âgées – de l’âge de mes parents – étaient elles aussi dans une situation aussi désespérée », raconte-t-elle.
« Il faut davantage de protections hygiéniques, non seulement à Kibera mais aussi dans les autres bidonvilles, et même dans les zones rurales. Nous ne représentons qu’une petite partie des femmes et filles de ce pays : ce sont des millions de filles qui recevaient des produits hygiéniques dans leurs écoles », dit Cynthia.
Plan International souhaite aussi que les adolescentes puissent accéder à des salles de bain à Kibera et dans les autres bidonvilles de Nairobi, pour gérer leur hygiène personnelle.
« Un accès à une douche coûte 10 centimes (10 KSh) par personne. Imaginez le montant que cela représente pour une famille de 7 personnes, ou pour 3 adolescentes. Se laver devient un luxe, qui passe après d’autres priorités, telles que l’achat de nourriture. Le même montant permet d’acheter des légumes pour nourrir une famille entière, ou encore d’acheter de l’eau pour boire et cuisiner. C’est pour cela qu’il est important de compléter la distribution de protections hygiéniques par un meilleur accès aux salles de bain », explique Marel.