Cela fait maintenant plus de six mois que le conflit a éclaté dans la région éthiopienne du Tigré, et la crise a un impact dévastateur sur les enfants et leurs familles. Les filles sont particulièrement affectées par ces conditions de vie, notamment lorsqu’elles ont leurs règles.
Être une fille dans les camps de réfugiés
Des abris informels ont vu le jour dans des écoles, des églises et d’autres bâtiments communaux pour accueillir le nombre croissant de personnes déplacées par les combats. Worke, 14 ans, vit depuis sept mois dans un abri à Gondar Nord, dans la région d’Amhara, avec son frère et sa sœur aînés.
« Lorsque mes parents vivaient ensemble, nous menions une vie meilleure. Cependant, après le divorce de mes parents, je suis allée au Tigré avec mon frère et ma mère. Notre mère travaillait dans un bar pour nous donner les moyens de survivre », raconte Worke lorsqu’on l’interroge sur sa vie au Tigré.
Lorsque des combats ont éclaté entre les forces de défense nationale éthiopiennes et les troupes érythréennes d’une part, et les combattants du Front de libération du peuple du Tigré d’autre part, Worke et sa famille ont fui, craignant pour leur vie, avec uniquement leurs vêtements sur le dos.
La vie dans le camp est dure, avec peu d’intimité et des conditions de surpopulation. La nourriture est rare et les rations sont irrégulières et insuffisantes. « Nous recevons principalement du blé que nous rôtissons pour en faire notre repas, mais c’est ennuyeux de manger la même chose tous les jours », raconte Worke.
La gestion de ses règles est un autre défi majeur. Sans argent, elle ne peut pas acheter les produits essentiels dont elle a besoin, notamment du savon, des produits d’hygiène menstruelle et des vêtements de base, qui sont nécessaires pour préserver sa santé et sa dignité.
Lorsque Worke est arrivée dans le camp, elle a reçu un kit de dignité, mais les serviettes hygiéniques sont maintenant épuisées. « Ils m’ont donné quatre paquets contenant trente serviettes. Je n’ai plus de serviettes maintenant. Je ne sais pas quoi faire. Peut-être que je vais déchirer mes vieux vêtements en morceaux pour m’en servir de serviettes. »
« Quand j’étais au Tigré, je pouvais acheter des serviettes hygiéniques », explique Worke. « Comme il n’y a pas d’argent maintenant, je ne peux plus les acheter. La somme d’argent que je dépensais pour les serviettes avant pourrait servir à m’acheter un kilo d’oignons ici. »
Les règles: un tabou renforçant les inégalités de genre
Les menstruations sont un sujet tabou chez les filles et les femmes du camp, dont beaucoup connaissent mal leur propre corps et n’ont jamais reçu d’éducation sur leur santé et leurs droits sexuels et reproductifs. Beaucoup de gens croient également que lorsqu’une fille commence à avoir ses règles, cela signifie qu’elle est en âge de se marier.
« Comme il n’y a pas d’éducation aux questions de genre dans la région où je vivais, lorsqu’une fille a ses règles, elle ressent de la honte et de l’humiliation. Seules les filles qui peuvent se permettre d’acheter des serviettes hygiéniques ont a chance d’aller à l’école et de poursuivre leur éducation. Les autres n’ont pas cette possibilité. Elles doivent rester à la maison, même si elles doivent passer un examen, elles ne peuvent pas le faire si elles n’ont pas de serviettes hygiéniques ».
Seules les filles qui peuvent se permettre d’acheter des serviettes hygiéniques ont a chance d’aller à l’école et de poursuivre leur éducation.
Worke raconte qu’elle et ses amies ont souvent vécu des expériences humiliantes lorsqu’elles avaient leurs règles. « Si une fille en période de menstruation s’assoit sur un banc et y laisse une trace de sang, personne ne s’y assiéra plus. De plus, une fois qu’une fille a commencé à avoir ses règles, elle ne peut plus rencontrer ses amis comme elle le faisait auparavant. »
Plan International lutte pour la dignité des filles
Plan International travaille dans les camps des régions du Tigré, de l’Amhara et de l’Afar pour améliorer les conditions de vie des enfants et de leurs familles et répondre aux problèmes de protection de l’enfance. Nous avons fourni à des milliers de filles des kits de dignité pour les aider à gérer leurs règles. Chaque kit contient des produits d’hygiène de base tels que du savon, des barres détergentes, et des produits d’hygiène menstruelle tels que des serviettes hygiéniques, des sous-vêtements et d’autres articles essentiels.
Les kits de dignité protègent non seulement les filles des problèmes potentiels d’hygiène et de santé, mais améliorent également leur bien-être psychosocial et physique. Alors qu’elles vivent dans des conditions de surpopulation et sont privées d’activités génératrices de revenus, les kits aident les femmes et les filles déplacées à retrouver un sentiment de dignité et de normalité.
« Actuellement, les filles qui vivent dans les abris doivent recevoir des serviettes hygiéniques en plus de la nourriture. Nous avons donc besoin que des organisations humanitaires comme Plan International nous viennent en aide en ce moment », lance M. Worke.