La Guinée est le 2ème pays le plus touché par l’excision. En effet, 97 % des femmes de 15 à 49 ans sont excisées. Et contrairement à d’autres pays d’Afrique subsaharienne, cette pratique ne régresse pas. Plan International se bat pour éliminer les mutilations génitales féminines en sensibilisant les communautés sur les risques encourus.
L’excision, une pratique violente ancrée depuis des générations
En Guinée, les mutilations génitales féminines sont pratiquées au sein de toutes les ethnies, toutes les religions et tous les milieux socioprofessionnels. Si la pratique tend à diminuer au niveau international, elle tend à augmenter en Guinée : le pays occupe ainsi le 2e rang au classement mondial derrière la Somalie !
Même si l’excision représente une violation des droits de la femme, elle est pourtant défendue par un grand nombre de femmes et de communautés, car elle fait partie de la tradition depuis des générations. C’est pourquoi l’ONG Plan International agit au sein même des communautés pour éradiquer cette coutume parfois mortelle.
Sauver les filles de l’excision en Guinée
Pour éradiquer les mutilations génitales féminines en Guinée,», Plan International a lancé le projet : « Sauvons les filles de l’excision. » Il a lieu dans :
- 1 région (sur les 4 touchées par cette pratique en Guinée)
- 2 préfectures (sur 33) : Guéckédou et Kissidougou, dans le sud-est du pays
- 10 communes – 8 rurales et 2 urbaines (sur 23)
- 40 districts (sur 248)
- 10 quartiers dans les 2 communes urbaines de Kissidougou (au sud, dans la région administrative de Faranah et la région naturelle de Guinée forestière) et de Gueckedou (aux frontières de la Sierra Leone et du Libéria).
Nous nous attaquons aux fausses croyances autour de l’excision et sur les risques mortels de cette pratique. Ainsi, en concertation avec les communautés, nous avons mis en place :
- des cérémonies alternatives de passage de l’enfance à l’âge adulte, pour remplacer l’excision des filles qui signifie qu’elles sont devenues femmes
- des dialogues avec les grand-parents, les parents, les adolescents et les enfants, de tout sexe, sur l’importance de l’égalité filles-garçons, sur la sexualité et les croyances liées aux mutilations génitales féminines
- des discussions entre des filles non-excisées et excisées
- deux centres de réception des plaintes sur l’excision
- la formation de 100 sages-femmes sur le risque d’exciser les filles
- un soutien financier pour organiser les cérémonies célé d’abandon de l’excision dans les communautés
- un soutien financier et technique aux communautés ayant abandonné les mutilsations génitales féminines pour éviter toute sanction par les autres communautés voisines
- Nous menons également des actions de plaidoyer dans la zone de Conakry, la capitale. L’objectif est de responsabiliser les autorités gouvernementales pour qu’elles soutiennent concrètement cette lutte dans les zones touchées, en conformité avec le Plan national d’Actions de lutte contre les mutilations génitales féminines en Guinée mené par le ministère des Affaires sociales.
Des résultats encourageants pour mettre fin à l’excision !
Depuis le début du projet :
- 2 380 filles ont été sensibilisées à l’école sur les risques de l’excision sur leur vie
- 2 090 filles non excisées ont été identifiées, dont 1 040 ont suivi les rites alternatifs et ont été sauvées de l’excision.
- 19 quartiers/communautés ont d’ores et déjà célébré publiquement l’abandon de ces pratiques traditionnelles néfastes
- 21 autres doivent abandonner la pratique de l’excison d’ici 1 an.
Cependant, même si ces résultats sont encourageants, le combat continue.
Rencontre avec deux militants anti-excision
Finda Iffono et Fara Djiba Kamano lutte pour l’abolition de cette pratique en Guinée. Vendredi 2 février 2018, ils ont pris la parole à Paris avec la fondation Plan International France.
Retrouvez leurs témoignages sur notre page Facebook.
Voici leurs histoires :
Fara Djiba Kamano (32 ans) : un homme au service de la protection des filles et des femmes
Au commencement, il y a la mère, Madeleine Tolno, dite Tante Mado, sage-femme et première grande activiste des droits des femmes en Guinée. C’est elle qui sensibilise très tôt Djiba. En 1999, elle crée l’Association des femmes pour l’avenir des femmes (AFAF), soutenue par l’ONG Plan International Guinée. Une exception à l’époque, car au sein de sa communauté, comme dans le reste du pays, l’excision est considérée comme une norme sociale. Celles et ceux qui s’y opposent risquent gros : critiques, pressions, menaces, stigmatisation, exclusion… À ses côtés, il apprend les bénéfices d’une approche communautaire participative et inclusive, qui favorise l’écoute, le dialogue intergénérationnel, les rites alternatifs d’initiation sans excision, etc. Et tente de réduire les résistances, tout en valorisant la culture du milieu.
Devenu consultant au service du ministère de l’Action Sociale, de la Promotion Féminine et de l’Enfance, il forme plus de 2 000 acteurs dans le pays à ces techniques. Si l’action conjointe de la mère et du fils, « candidats à la mort », comme les vilipendent leurs opposants, se limitait dans un premier temps à la région de préfecture de Guéckédou (au sud, à la frontière avec le Libéria), des levées de fonds successives lui permettent de couvrir 13 préfectures, touchant ainsi plus de 1 000 villages et communautés – 40 000 filles sont identifiées et ainsi protégées, dont 600 ont pris l’engagement de mettre fin aux MGF et aux mariages précoces et forcés. Régulièrement traité de « traitre », Djiba accepte de payer le prix fort, celui du « sacrifice de sa vie » pour continuer à sauver les filles et les femmes de l’excision.
Finda Iffono (35 ans) : des convictions plus fortes que la tradition
Pour cette juriste de formation, qui coordonne le projet « Sauvons les filles de l’excision » de Plan International en Guinée – à ce titre, elle travaille quotidiennement avec Finda –, tout a commencé lors de son accouchement. Elle réalise ce jour-là qu’elle est « une victime de l’excision ». Elle décide alors que sa nièce de 8 ans ne doit pas, elle aussi, subir cette mutilation. Problème : sa grand-mère est une exciseuse notoire au village. Et lorsque sa mère apprend par hasard qu’elle travaille désormais à lutter contre les MGF, la menace tombe : « Ton village est conservateur de la pratique et ta grande mère occupe un rang de taille dans le rituel de l’excision. Lorsqu’elle apprendra la nouvelle, ils nous tueront tous ! ».
Finda ne se démonte pas et reste à la convaincre : « L’excision est une violence, j’en suis victime. Lorsque l’on meurt en voulant sauver la vie, c’est plus intéressant ». Quotidiennement, auprès de sa communauté et au sein de l’ONG, Finda fait la promotion de l’abandon des MGF. C’est le combat de sa vie, rythmé par une certitude : sa petite fille de 2 ans ne subira jamais l’excision !