À l’occasion de la Journée mondiale contre l’esclavage des enfants, le 16 avril, Plan International rappelle que l’esclavage domestique des filles est une véritable barrière à leurs droits, à leur éducation et à leur développement. Tour d’horizon au Népal, où plus de 8 000 filles et femmes sont victimes de la traite chaque année.
Au Népal, l’esclavage moderne prospère
« Je marchais sur le chemin de ma maison quand 2 hommes m’ont enlevée. J’avais 15 ans lorsque j’ai été kidnappée », raconte Karina*. « Ils ont élaboré des plans pour me vendre en Inde et m’ont ordonné de n’en parler à personne. »
Chaque jour, la traite des filles est pratiquée à très grande échelle dans le pays : une fille par heure est enlevée de force pour être vendue. On appelle ces filles mineures, esclaves domestiques modernes, des Kamalari.
Depuis le Népal, elles sont emmenées en Inde par la frontière ou envoyées par-delà les mers à leurs acheteurs à différentes fins.
- Plus de 8 000 filles et femmes sont victimes de la traite au Népal chaque année.
- 99 % des personnes exploitées sexuellement à des fins commerciales dans le monde sont des femmes
- Près de 46 millions de personnes sont victimes de l’esclavage moderne dans le monde (global slavery index 2016)
« Je ne pensais pas que cela puisse m’arriver un jour. J’étais complètement perdue. J’aimerais dire aux autres filles : ne faites jamais confiance à un inconnu », explique Anita*.
La traite des filles, un engrenage élaboré
La traite est une forme de violence contre les filles et les femmes. Peu valorisées dans les sociétés népalaises ou indiennes, de nombreux facteurs expliquent ce phénomène :
- La plupart vivent dans une extrême pauvreté
- L’accès à une éducation de qualité, des formations professionnelles ou à l’information est très limité pour les filles
- Elles ont moins d’opportunités d’emploi et de salaires convenables que les hommes
- La violence contre les filles et les femmes est normalisée et très peu sanctionnée
« Les filles devraient être plus informées avant de partir à l’étranger. Sans ce savoir, elles peuvent être victimes de la traite, comme moi », soupire Sharmila*.
Davantage vulnérables aux différentes formes de trafics, elles sont les cibles des techniques de manipulation et tromperie bien rôdées des trafiquants.
Enlevées de force, elles sont contraintes de quitter leur famille et leurs proches. Les trafiquants se font d’abord passer pour leur « petit ami » et leur promettent du travail, une nouvelle vie à l’étranger et une chance de sortir de la misère. Dès qu’elles tombent dans le piège, elles sont enlevées, abusées, exploitées et vendues comme esclaves.
Une fois hors de chez elles, les filles sont :
- Exploitées sexuellement dans les maisons closes
- Forcées au mariage précoces avec des inconnus
- Forcées à la servitude domestique et aux tâches ménagères
- Forcées de travailler dans les usines de textile
Avec l’arrivée d’internet et l’augmentation des téléphones portables, les trafiquants utilisent de nouvelles méthodes pour séduire les filles et leurs familles : à travers les réseaux sociaux comme Facebook, les trafiquants traquent les filles, les repèrent et les manipulent grâce à des fausses promesses, afin de les exploiter sexuellement et les vendre.
« Le plus gros problème, c’est qu’une fois qu’elles sont attirées hors de chez elles, la plupart des filles sont abusées sexuellement », explique Rupa, responsable des programmes de protection de l’enfance au sein de Plan International Népal.
« Même si elles réussissent par se libérer et revenir dans leur famille, leur réintégration devient très compliquée, car elles sont stigmatisées par leur communauté à cause de ce qu’elles ont subi. Très peu de filles arrivent à parler des horreurs qu’elles ont vécu à cause de la traite ».
Plan International lutte pour un changement des pratiques et des mentalités
Sur le terrain, notre ONG travaille avec les communautés qui vivent au bord de la frontière entre le Népal et l’Inde, là où les filles sont les plus vulnérables aux dangers de la traite. Depuis le début des opérations, en 2006, nous avons libéré plus de 4 000 Kamalari.
En 2015, la jeune Urmila Chaudhary, ex-Kamalari népalaise, est venue en France pour défendre les Droits des Filles et témoigner de l’enfer des enfants victimes de la traite. Aujourd’hui, elle est au cœur du projet de Plan International pour l’abolition des Kamalari.
En 2018, le Népal est au cœur d’un changement politique sans précédent, le pouvoir local prend de l’ampleur face au national. C’est une opportunité exceptionnelle : pour la première fois, les maires nouvellement élus auront le pouvoir de créer des actions locales et prendre des mesures pour les Droits des Filles et contre la traite.
Plan International s’engage au Népal auprès des maires afin de faire avancer les Droits des Filles et protéger les filles et les femmes de la traite.
* Les noms ont été changés pour une questions de sécurité.